10/03 : les secrets du succès du Tour des 4B
les secrets du succès du Tour des 4B
Par Vincent NAËL
En seulement quatre ans d’existence, la course sud-charentaise s’est déjà fait une belle place dans l’élite amateur. Son jeune directeur, Benjamin Didou, dévoile sa recette.
On était en stage à Calpé, au sud-est de l’Espagne, entre coureurs et dirigeants. Je devais monter un projet pour mon DUT techniques de commercialisation et j’ai dit au président du club, Philippe Nadon : ‘personne ne veut jamais organiser les interclubs en Charente, alors pourquoi pas nous ?’ » De cette vanne de Benjamin Didou est né le Tour des 4B en 2019, dont la 4e édition se tiendra dimanche, au départ de Brossac.
La course labellisée Élite nationale dès 2021 - un succès d’une précocité rare - concurrence désormais l’emblématique Grand Prix de Buxerolles, disputé le même jour dans la banlieue de Poitiers, et ses trois décennies d’existence.
« Déjà, il a fallu payer »
Mais quelle est la recette pour passer aussi vite de l’étiquette de première catégorie (meilleur niveau régional) à celle du gratin amateur ?
« Déjà, il a fallu payer, se marre celui qui est directeur de l’événement sud-charentais à seulement 23 ans. Entre 2019 et 2021, on est passé de 6.000 à 14.000 € de budget (15.800 € cette année). Par exemple, depuis qu’on est sur le calendrier fédéral, on donne 3.000 € aux instances, alors que ça nous coûtait 1.500 € à l’échelon inférieur. Les primes destinées aux coureurs et aux équipes ont aussi doublé : les vingt premiers se répartissent désormais 1.220 €, la meilleure formation reçoit 1.000 €… »
Une augmentation des dépenses couverte par la subvention de la Région (1.500 €), celle du Département ou encore le naming de l’épreuve jusqu’à la précédente édition. « Pour cette année, avec le triplement du nombre de nos partenaires privés, nous n’avons même plus besoin de sponsor titre. »
Et malgré sa montée en grade, le Tour des 4B n’est pas plus difficile à organiser qu’à l’époque, selon Benjamin Didou : « Les ambulances, les motos sécurité, les signaleurs à chaque carrefour… ce sont les mêmes contraintes ! »
Les coureurs, eux, sont désormais d’un tout autre rang. Le gamin se rendant, il n’y a encore pas si longtemps, sur les cols de la Grande Boucle avec ses grands-parents était d’ailleurs loin d’imaginer que des pros ou amateurs de DN1 - dont l’ancien maillot jaune du Tour Romain Feillu - viendraient se tirer la bourre dans le coin pour une course d’un jour. La sienne qui plus est.
« Je nous revois en 2019, avec mon pote de promo Clément Debien, en train de toquer à la porte de toutes les entreprises de Barbezieux pour gratter un partenariat, sourit le gars de Saint-Eugène. On prenait même les chèques de 50 euros. »
Soutien local, réseau régional
Heureusement pour eux, certaines ont donc été plus généreuses : « Notre chance, c’est qu’on a de grosses sociétés familiales ici. Comme il manquait une manifestation sportive d’envergure, elles n’ont pas hésité à investir pour animer leur territoire. »
De quoi, en plus, s’offrir le monopole puisque l’association cycliste des 4B est le seul club organisateur à de nombreux kilomètres à la ronde.
Verni jusqu’au bout, Benjamin Didou a aussi eu le luxe de démarrer son projet avec un binôme qui avait des relations : « Comme le père de Clément Debien est partenaire du Tour Poitou-Charentes, il connaissait le directeur, Alain Clouet. Lui et Raphaël Naudon, qui gère la partie sportive, nous ont donné plein de conseils. Au début, on s’appelait presque tous les jours. »
Aujourd’hui, les deux figures de la petite reine régionale filent toujours un coup de main, prêtant le véhicule ouvreur, le podium des arbitres, les panneaux vert et rouge, s’occupant des accréditations…
C’est tellement facile qu’on se demande : les jeunes organisateurs ont-ils vécu, au moins, une seule galère dans cette histoire ? « Au début, pour obtenir les autorisations des communes à traverser, ça a été compliqué, se souvient celui qui est désormais étudiant en double master d’administration des entreprises, à Poitiers. Il fallait déjà réussir à les joindre, ensuite les convaincre, puis les relancer sans cesse, à deux… »
Mais décidément, sur ce territoire, rien ne pouvait lui arriver : « Voyant ça, le président de la Communauté de communes, Jacques Chabot, m’a invité au conseil communautaire en décembre 2019. On a ainsi pu négocier avec les 40 maires. Une subvention de 50 euros a même été votée. Elle est versée par chaque commune présente sur notre parcours. »
Des coureurs aussi organisateurs
Tout était débloqué… ou presque, car le club manquait de bénévoles. Alors Benjamin Didou, aussi licencié à l’AC4B en tant que cycliste amateur, a entraîné dans l’aventure ses coéquipiers. « Il y a une majorité de jeunes de 18, 19, 20, 21 ans… dans l’organisation, ce qui est assez rare dans le milieu. Beaucoup roulent ensemble depuis la catégorie minimes et se retrouvent à conduire la voiture-balai, vendre les programmes… En 2021, comme on n’avait pas assez d’argent, Mateo Denechaud avait même dû s’improviser cameraman alors qu’il est… plombier. (rires) »
Enfin, cette réussite est aussi liée à l’investissement de plusieurs parents de licenciés, sans oublier les « anciens » de l’AC4B.
« Le président, Philippe Nadon, est mon bras droit, Jean-Louis Rouzeau a créé toutes les panneautiques, le vice-président Bernard Angibaud enlève les pancartes après le passage des coureurs..., énumère le patron de l’épreuve. C’est un alliage gagnant. »
Et un succès parti pour durer. Car depuis cette année, les partenaires ne soutiennent plus seulement le Tour des 4B, mais l’ensemble de l’association. Ils ont même porté leur engagement d’une à trois saisons.
Du beau monde au départ
Sur les 109 coureurs engagés et 23 équipes représentées dimanche, à Brossac, il y aura du beau monde.
Deux professionnels de la team Conti (deuxième division) Go Sport-Roubaix Lille Métropole, Maxime Jarnet et Maximilien Juillard, seront de la partie. Mais aussi d’anciens pros comme le Charentais Yoann Paillot (Morbihan Fybolia GOA) et l’ex du Top 16 Clément Saint-Martin (CC Périgueux Dordogne).
Ils seront toutefois esseulés face à l’armada de Vendée U et Aix-en-Provence, les deux premières formations du classement de DN1, venues à huit et sept coureurs.
L’équipe charentaise du Top 16, composée de huit éléments, tentera, elle, de créer la surprise.
Côté local, à noter la présence au départ de quatre licenciés du club organisateur, l’AC4B.
Pour revenir aux favoris, il faudra notamment surveiller Baptiste Vadic et Lucas Boniface, qui occupent la tête et la troisième place du tableau individuel de DN1.
Vainqueur du Circuit de l’Essor, le 5 février, puis de Manche-Atlantique, un mois plus tard, le premier, plein de punch, est inarrêtable en ce début de saison. Mais il faudra aussi se méfier du second, qui s’est imposé deux fois au sprint sur les Plages vendéennes, à Challans, le 11 février, puis à Saint-Georges-de-Pointindoux, le 16.
Date de dernière mise à jour : samedi, 11 mars 2023